samedi, avril 27, 2024
Le Plan Local d'Urbanisme (PLU)

En route vers le PLU

La commune y travaille depuis 2006. Après 4 essais (3 récusés et un inachevé) et 8 ans sans PLU, ce 5ième essai devra être réussi.

La 1ère étape a été franchie : la réunion d’information du 31 janvier 2024 nous a fait découvrir le Projet d’Aménagement et de Développement Durable (PADD) qui donne les grandes orientations d’un futur PLU qui pourrait aboutir au mieux fin 2024.

Ce PADD doit tenir compte de toutes les règlementations supérieures comme la loi Littoral ou le SRADDET de la Nouvelle-Aquitaine, et respecter le nouveau SCoT de la CARA qui, lui-même, intègre toutes les règlementations en vigueur.

Parmi elles, la loi « Climat et Résilience », de 2021, impose une grande sobriété vis-à-vis de l’artificialisation des sols : la diviser par deux par rapport à la précédente décennie, et la stopper d’ici 2050. Une loi qui comptera beaucoup pour notre commune habituée à une urbanisation débridée hors cadre d’un PLU et dévoreuse d’espaces naturels.

Le compte rendu du débat sur le PADD en Conseil Municipal (le 14/11/2013) et la présentation du 31/01 en public montrent bien l’ampleur des enjeux. Soulignons en quelques-uns.

Le PADD dresse un inventaire presque complet des espaces naturels et de leurs protections

La page 14 de la présentation publique (ci-dessous) montre bien la richesse de la commune en milieux naturels, boisés et agricoles, et les protections dont ils bénéficient. Il faudra corriger tout de même une erreur qui réduit beaucoup le périmètre Natura 2000 de la ZPS n° FR 5412012.

Page 14 de la présentation du PADD du PLU

En page19 de la présentation du 31/01, la carte des espaces remarquables, au sens de la loi Littoral, intègre les zones Natura 2000 et les zones humides répertoriées par le SAGE Seudre et le SAGE estuaire Gironde. Nous sommes rassurés de voir ces espaces inconstructibles alors que de gros projets immobiliers, heureusement bloqués, prévoyaient, il y a quelques années, d’en consommer par hectares (zone commerciale, bois du Maine, parc résidentiel de loisirs, par exemple).

Espaces remarquables – p. 19, présentation du PADD du PLU

Pour compléter cet inventaire, rappelons quelques éléments remarquables du territoire de la commune. Sur la figure ci-dessous, nous avons superposé à l’illustration de la page 4 de la présentation du 31 janvier

  • Les marais doux de La Tremblade, Arvert et de Bréjat (en bleu clair) avec leurs réseaux de canaux (en bleu foncé)
  • Les périmètres des Associations Syndicales (ASCO) qui gèrent les marais doux de La Tremblade et d’Arvert (en violet)
  • Les acquisitions du Conservatoire du Littoral (en vert)
  • Les limites extérieures des forêts de protection (en rouge)
Quelques éléments remarquables du territoire de la commune

La commune des Mathes La Palmyre bénéficie donc d’immenses espaces naturels bénéficiant de protections dont le PLU devra tenir compte.

A contrario, elle est caractérisée par sa vingtaine de campings qui totalisent près de 7000 emplacements et 190 ha qui pèsent très lourd sur son fonctionnement, sa sécurité incendie et son mode de tourisme. Ces campings sont en violet sur la page 30 de la présentation du PADD. Comment le PLU traitera-t-il leur avenir ?

A ce sujet, nous nous étonnons de voir la zone occupée par le camping géant des Charmettes (Siblu) classée en espace remarquable alors qu’il s’agit bien, comme tous les autres campings, d’un espace très artificialisé.

La page 33 de la présentation du PADD montre les contours des « villages » de La Palmyre et des Mathes qui seront fixés dans le PLU : il ne sera possible d’urbaniser qu’à à l’intérieur de ces villages ou en continuité :

Contours des « villages » de La Palmyre et des Mathes (p. 33 de la présentation du PADD du PLU)

Evolution du trait de côte et prévention des risques de submersion et d’incendie

Le débat en Conseil Municipal et la présentation publique (pp. 21, 24 et 25) rappellent que le PLU doit traiter de la bande littorale et du recul du trait de côte à 30 et à 100 ans.

Pour en avoir une idée à cette échelle de temps, on doit intégrer des phénomènes bien différents mais intimement liés :

  • L’érosion de nos côtes sableuses et les changements rapides de la baie de Bonne Anse.
  • L’avènement possible d’une tempête du type Xynthia (marée haute de fort coefficient, surcote météorologique importante, vents « favorables »).
  • La montée inexorable du niveau de la mer due au réchauffement climatique.

tout cela en tenant compte de la faible altitude d’une grande partie de la commune (à l’exception des formations dunaires et du bourg historique des Mathes) : de 2 à 5 m NGF, à comparer aux 2,8 m NGF atteints par une marée haute de coefficient 120, hors surcote ou élévation du niveau de la mer. Aujourd’hui, la RD25 joue le rôle de digue protectrice pour ces zones de faible altitude du nord de La Palmyre dont certaines sont densément construites.

A la suite de la tempête Xynthia, des simulations ont été faites pour évaluer les enjeux liés aux risques de submersion marine dans les Territoires à Risque Important (TRI) du Littoral Charentais-Maritime. La figure ci-dessous montre les zones qui pourraient être inondées à la suite d’un évènement similaire à Xynthia conjugué à une montée de 60 cm du niveau de la mer due au réchauffement climatique :

Simulation des zones inondées lors d’un évènement type Xynthia conjugué à une montée de 60 cm du niveau de la mer

Les risques de submersion ne sont donc pas anodins et les projections à 30 ou 100 ans de l’évolution du littoral doivent être étudiées soigneusement.

La présentation du 31 janvier souligne l’obsolescence du Plan de Prévention des Risques Naturels de la commune. Il doit donc être révisé. C’est le cas des risques de submersion, comme on vient de le souligner. Il est nécessaire aussi de mettre à jour les risques d’incendie. On pense notamment à la zone, surpeuplée en été, des campings de la Fouasse difficiles à évacuer par les seules deux routes d’accès.

La consommation d’Espaces Naturels Agricoles et Forestiers (ENAF) est désormais jugulée.

C’est une nouveauté pour ce PLU : la loi « Climat et Résilience » impose de diviser par deux en 10 ans l’artificialisation des sols par rapport à la précédente décennie, et d’atteindre le zéro artificialisation nette (ZAN) en 2050. Le SRADDET de la Nouvelle-Aquitaine et le SCoT de la CARA qui l’appliquent déjà s’imposent à la commune.

Pour le DOO du SCoT, le bourg des Mathes est un des 8 pôles de proximité de la CARA qu’il faut « maintenir et contenir » et dont la consommation d‘ENAF pour les 20 ans à venir sera limitée en moyenne de 0,5 ha/an.

Ce sera un défi car notre commune a été très gourmande en ENAF par le passé.

Pour s’en convaincre, il suffit de superposer la carte du PLU de 2013, qui représentait le bâti de l’époque, avec celle du bâti issu des données cadastrales de janvier 2024. Sur la figure ci-dessous, le bâti construit depuis la carte du PLU de 2013 apparait en jaune :

Carte du PLU de 2013 avec, superposé en jaune, le bâti construit depuis (selon données cadastrales de janvier 2024)

C’est impressionnant ! Et cette carte ne montre pas les plus de 15 ha de zones naturelles que l’annulation du PLU de 2013 a sauvés : ils devaient être transformés en parc résidentiel de loisirs ou en zone commerciale. Le projet de PLU de 2011 était encore plus gourmand.

C’est dire la difficulté de l’exercice imposé par la loi « Climat et Résilience ».

En page 30, la présentation du PADD tente de faire le bilan de cette consommation d’ENAF depuis 2014 (en vert) et trouve le chiffre provisoire de 19 ha (dont l’essentiel autour de Mathes), soit un taux d’artificialisation de 1.9 ha/an :

En vert: bilan de la consommation d’ENAF depuis 2014 (p. 30, présentation du PADD )

On peut se donner une idée chiffrée de cette consommation en consultant le référentiel régional d’Occupation du Sol (OCS) basé sur l’analyse d’images des satellites SPOT en 2009, 2015 et 2020. Ce n’est pas tout à fait la période ciblée pour le PADD, mais cela nous donne des indications intéressantes.

En effet, cette analyse identifie les zones d’évolution des ENAF vers l’artificialisation. Dans la figure ci-dessous, le référentiel régional d’OCS marque en rouge les zones considérées comme ayant été artificialisées entre 2009 et 2020. Elles représentent environ 16 ha, soit un taux d’artificialisation de 1,45 ha/an.

En rouge: zones considérées comme ayant été artificialisées entre 2009 et 2020 par le référentiel régional d’OCS

Une autre méthode consiste à comparer les vues satellites de Google Earth Pro entre avril 2014 et mai 2022. On voit ainsi l’évolution du bâti entre ces deux dates (on se focalise ici sur le nord-est du bourg des Mathes) :

Comparaison des vues satellites de Google Earth Pro d’avril 2014 et de mai 2022

Sur la figure suivante, nous avons sélectionné (en jaune) les parcelles artificialisées entre les deux vues satellites de Google Earth Pro prises en avril 2014 et mai 2022 : elles totalisent 17,9 ha, soit un taux d’artificialisation de 2,2 ha/an.

En jaune: parcelles artificialisées entre les vues Google Earth Pro d’avril 2014 et de mai 2022

Les différentes cartes présentées illustrent bien le processus rapide d’artificialisation des sols de la commune. Le tableau ci-dessous confronte ces estimations de consommation d’ENAF annuelles à l’objectif que le projet de DOO du SCOT de la CARA vise pour un pôle de proximité comme le « village » des Mathes:

Quelle que soit la méthode employée, l’estimation du taux d’artificialisation sur la commune des Mathes se situe entre 1,45 et 2,2 ha/an.

Ces chiffres vont certainement être précisés plus rigoureusement dans les mois prochains, mais on imagine dès maintenant qu’ils seront très au-dessus de la moyenne de 0,5 ha/an préconisée actuellement par le projet de SCoT de la CARA.

L’avenir est donc sous le signe d’une sobriété foncière drastique.

D’ailleurs le problème se pose déjà puisque deux gros projets de construction déposés en mairie fin 2023 totalisent à eux seuls 3,75 ha d’ENAF artificialisés. Si leur demande de permis était accordée, cela représenterait plus de 7 ans du crédit de 0,5 ha/an qui pourrait être accordé à la commune des Mathes par le SCoT de la CARA !

En conclusion :

La présentation du PADD du 31 janvier nous semble faire le tour des sujets relatifs au futur PLU. Nous avons formulé ci-dessus quelques remarques concernant :

  • la prise en compte de tous le types d’espaces naturels et de leurs protections
  • le poids des campings
  • la nécessité d’anticiper le recul du trait de côte à 30 et à 100 ans
  • la prévention des risques de submersion et d’incendie
  • la maitrise de la consommation d’ENAF et la gestion de gros projets immobiliers actuels

Nous espérons voir notre commune s’acheminer enfin vers un PLU préservant le cadre de vie de ses habitants et de ses visiteurs. En se donnant les moyens de respecter toutes les règlementations, le SCoT de la CARA et le STRADDET de la région NA, la commune s’épargnera de voir sa 5ième version de PLU récusée.

Nous suivrons attentivement son élaboration et sa mise en place.